En direct avec Réseau Vrac
Cette semaine c'est avec Réseau Vrac que nous échangeons.
Célia Rennesson est la directrice générale et partage avec nous sa vision sur le vrac & le réemploi
Célia, peux-tu nous présenter Réseau Vrac en quelques mots ?
Reseau Vrac, c’est une association de loi 1901 par adhésion volontaire qui fédère les acteurs économiques de la filière vrac, du producteur au magasin, avec pour ambition de démocratiser le vrac en France.
L’association s’est créée il y a 6 ans pour structurer et faire émerger le marché, en réunissant toutes les parties prenantes.
L’ambition est d’encourager une autre forme de consommation du quotidien autour de 2 enjeux principaux : promouvoir la juste quantité pour éviter le gaspillage des produits et donc des ressources, réduire l’usage unique des emballages en poussant pour leur réemploi.
L’association, qui compte désormais 12 personnes dont 8 salariés, a 3 missions:
1- Structurer le marché, c’est-à-dire définir ses règles et harmoniser les pratiques des professionnels via de la formation et, des actions de lobbying ;
2- Développer la filière, notamment grâce à l’organisation annuelle d’un salon B2B « le Salon du Vrac et du Réemploi » ;
3- Encourager une nouvelle forme de consommation, en prenant la parole auprès de tous les publics (citoyens, pouvoirs publics, entreprises et médias).
Quels sont les enjeux de Réseau Vrac sur les mois à venir ?
Depuis 6 ans que l’association existe, nous avons fait beaucoup pour faire émerger ce marché et donner un cadre à la filière vrac.
Nous avons mené les 3 premières années un gros travail de fond, de « débroussaillage » qui commence à porter ses fruits. Ce travail s’est notamment concrétisé en 2020 par l’entrée dans la loi d’une définition de la vente en vrac en France dans le cadre de la loi « AGEC » et puis en 2021 la loi « Climat & Résilience » a consacré un article au vrac avec des objectifs pour les points de vente de plus de 400m2.
La feuille de route que l’on se fixe pour les mois à venir est claire :
- Veiller à l’application des lois.
Nous attendons avec impatience la publication des décrets qui vont rendre plus concrets les obligations fixées dans ces deux lois. Nous veillerons évidemment à ce que les lois s’appliquent sur le terrain !
- Continuer à lever les freins à l’adoption du vrac.
Nous le savons, un des freins identifiés est la garantie de conditions d’hygiène satisfaisante.
Dès 2017, Réseau Vrac a mis en place une formation et a rédigé un Guide des Bonnes Pratiques d’Hygiène de la vente en vrac à destination de ses adhérents et de la filière dans son ensemble.
Nous devons renforcer la formation des personnels de vente et la rendre obligatoire. Sur demande du Ministère de l’économie nous travaillons en ce moment à la rédaction d’un GBPH officiel et commun avec la Fédération du Commerce et de la Distribution.
Il y a d’autres freins que nous avons identifiés dès la création de Réseau Vrac mais que nous n’avions pas pu adresser.
Aussi nous avons lancé cette année un nouveau programme : le « Tremplin Innovation » pour mettre en marché des solutions ou équipements visant à lever les freins au vrac.
Un Comité d’Experts conseille pendant un an 9 entrepreneurs et les aide à faire aboutir leurs innovations.
- Elargir l’offre de produits disponibles en vrac.
Si l’on veut faciliter la transition vers le vrac, il faut permettre aux citoyens de faire toutes leurs courses en vrac; retrouver tous les types de produits mais aussi ceux qu’ils ont l’habitude d’acheter.
52% des Français veulent des produits de marque en vrac par exemple. Pouvoir les retrouver en vrac ainsi qu’une large variété est indispensable.
Réseau Vrac est donc là pour encourager le marché, les producteurs et les distributeurs à développer ce mode de vente. Cela peut passer par l’innovation (avec notre Tremplin Innovation par exemple), mais aussi par la levée de freins législatifs (ex. notre action sur huile d’olive en 2018 pour permettre qu’elle soit vendue en vrac).
- Travailler sur le modèle économique.
Nous en sommes conscients, la filière vrac est jeune et petite comparée au pré-emballé jetable qui domine depuis plusieurs décennies et donc est largement optimisé et a de gros volumes.
L’objectif est de trouver des mécanismes pour soutenir économiquement la filière, avant que les volumes ne soient suffisants pour rentabiliser les investissements. Le consommateur, dans tous les cas, ne doit pas payer plus cher ses produits en vrac.
- Sensibiliser et éduquer.
Nous agissons en soutien des pouvoirs publics sur les aspects de sensibilisation et d’éducation : inscrire le vrac dans les programmes scolaires, organiser le « Mois du Vrac » en mars chaque année, et accompagner évidemment tous les acteurs de la chaîne de valeur (le producteur qui doit adapter ses chaînes, le magasin, le consommateur).
Comment vois-tu le marché du vrac aujourd’hui en France ?
Le vrac a une vraie belle carte à jouer dans un contexte d’inflation et de hausse du coût des matières premières.
La filière a bien résisté à la crise Covid, et la préoccupation N°1 des Français quand on leur parle de consommation responsable reste la réduction des emballages.
Par ailleurs, le choix de la juste quantité permet de faire ses courses sans se restreindre ni trop dépenser : « même en période de crise, on peut concilier fin du monde et fin du mois ».
Depuis mai 2021, le contexte est malgré tout difficile : une partie de la population en transition pendant la période Covid n’est pas revenue totalement. Le contexte anxiogène dans lequel nous vivons ne permet pas à mon sens, de mobiliser les consommateurs sur les enjeux environnementaux et d’engager un changement de leurs modes de consommation.
Ils en ont envie mais n’ont pas forcément l’énergie et la disponibilité pour le faire.
C’est pour cela que l’offre doit perpétuellement évoluer pour leur faciliter le passage au vrac et que nous devons continuer à prendre la parole positivement sur le sujet en faisant valoir tous les atouts du vrac.
Selon toi, quel rôle doivent jouer les marques et les distributeurs par rapport au marché du vrac et de la consigne ?
Les Distributeurs sont le 1er point de contact avec les consommateurs, ils se doivent d’offrir une alternative au pré-emballé jetable : une offre variée, un même niveau de qualité, un niveau de prix acceptable.
Les marques, de leur côté, ont une responsabilité avec la stratégie 3R qui va leur imposer 10% d’emballages réemployés en 2027, et ne peuvent donc plus raisonner uniquement avec « l’ancien modèle ».
Vrac et réemploi, même combat ?
Nous avons en commun le réemploi des emballages consommateurs ou fabricants. Il ne faut donc pas les opposer mais bien les penser comme complémentaires. Ils sont tous deux une modalité alternative aux emballages à usage unique et représentent l’avenir ! Par exemple, certains produits ne peuvent être vendus en vrac pour des raisons techniques ou législatives, les vendre dans des emballages réemployable est dans ce cas tout à fait adapté. Tout dépend également des moments de vie, et des habitudes de consommation.